L’accompagnement de Jésus dans nos vies, les pèlerins d’Emmaüs

Catégories : Paroles de dimanches

Luc 24:13-32

INTRODUCTION :

– temps de la résurrection (40 jours entre résurrection et ascension)

– rappel du précédent message sur ce passage (relire sa vie pour y lire Dieu)

– aujourd’hui ma proposition est de se centrer plus sur la personne du ressuscité et la manière dont il accompagne les pèlerins d’Emmaüs.

VERSETS 13 ET 14 :

Et voici, ce même jour, deux d’entre eux allaient à un village nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades (11 Kms); ils s’entretenaient de tout ce qui s’était passé.

Le contexte psychologique des deux disciples c’est le découragement. Il y a eu un grand investissement de leur part, ils avaient tout misé sur lui et espéraient bien eux aussi, être des héros.

Déçus, peut être amers, ils retournent chez eux en prenant la mauvaise direction. (Rappel de l’invitation de Jésus à le précéder en Galilée). On peut facilement imaginer qu’ils vont aussi être la proie des critiques de leur village, de leurs parents, de leur communauté.

« Tu as perdu trois ans de ta vie à suivre un beau parleur, tu as délaissé tes responsabilités professionnelles, ta famille, pourquoi? » « Qui va cotiser pour ta retraite? »

« C’est bien beau les communautés beatniks peace and love mais après il faut retomber les pieds sur terre »

VERSET 15 :

Pendant qu’ils s’entretenaient et discutaient, Jésus s’approcha et fit route avec eux.

Pendant qu’ils se lamentent, Jésus s’approche.

De la même manière aujourd’hui Jésus fait route avec nous.

Même quand nous sommes désabusés, désespérés, laminés par la déception, Jésus fait route avec nous.

Quand nous vivons la solitude, expérimentons la perte d’un proche, la diminution physique de nos corps, la maladie , le doute, le remord, la culpabilité, la dépression, et que de ce fait nous nous éloignons de Dieu ; Jésus fait route avec nous, sur nos chemins. Jésus nous accompagne discrètement presque secrètement; il ne s’annonce pas, ne s’autoproclame pas « ressuscité »; en cela il respecte notre liberté de choix.

Il se révèle délicatement. Jésus nous accompagne avec délicatesse. Il se laisse trouver sans jamais s’imposer,

Et quand nous ne le cherchons plus, il nous suit. (Parabole de la brebis perdue) ; il nous guette sur le chemin (le fils prodigue). Il se mêle à nos conversations, il prend part à notre humanité, se rend solidaire de nos détresses, de nos peines, mais aussi de nos fêtes, de nos joies (Cana).

Références à la vie du Christ :

– 30 ans de discrétion, de fraternité humaine.

– 3 ans de ministère de la parole et d’actions.

– 3 jours de sacrifice, de sacrement.

VERSET 16 :

Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.

On rentre au coeur du mystère de la résurrection

(Marie de Magdala et bien d’autres rencontrent ce problème de reconnaissance du Ressuscité (elle le prend pour le jardinier) les disciples le prennent pour un étranger, un pèlerin « incroyable! Comment ne l’ont ils pas reconnu?

Savons nous reconnaître sa présence dans nos vies quand nous sommes déçus, en colère, découragés, ou angoissés?

L’oeil, nous dit la Parole, c’est la lampe du corps, qui nous relie au monde.

Leurs yeux sont comme handicapés, empêchés, privés de la capacité de voir, de reconnaître,

Pourtant il n’avait pas changé d’aspect et eux n’étaient pas aveugles. Quelle «étrange cécité!!!»

En fait, pour le reconnaître il faut d’autres yeux que ceux de la chair, il faut que notre esprit soit rendu disponible.

Le désespoir les empêchait de voir cette nouvelle réalité de Jésus ressuscité : pour le voir il faut le regard de la Foi, et ce n’était pas possible à ce moment là.

VERSET 17 :

Il leur dit: « Quels sont ces propos que vous échangez en marchant? » et ils s’arrêtèrent, l’air attristé.»

La question qui arrête.

Fine pédagogie de Jésus qui les invite à parler, à partager, à exprimer le désespoir qui les habite. Cette simple question les arrête dans le cours de leur marche.

VERSET 18 :

L’un d’eux, nommé Cléopas, lui répondit: Es-tu le seul qui séjourne à Jérusalem et ne sache pas ce qui s’y est produit ces jours-ci?

Les disciples qui souffrent de la perte de Jésus, de leur espoir perdu, font de cette souffrance leur centre de gravité: ils tournent autour. Elle envahit leurs esprits, les aveugle, les détruit.

VERSET 19 :

Quoi? Leur dit-il.

Ils lui répondirent: Ce qui s’est produit au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en oeuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple.

Et comment nos grands prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort, et l’ont crucifié.

Jésus leur répond: « quoi? »

Question naïve? Il feint l’ignorance. À nouveau il leur permet de se raconter. Ce petit « quoi donc? » libère leur parole, détend curieusement la tension. Avant cette rencontre, ils parlaient entre eux et tournaient en rond, leurs paroles s’entrechoquaient. Ici la question de l’étranger un peu provocante s’offre comme un défi, une main tendue, provoque un jaillissement de la parole qui libère.

«Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël; mais avec tout cela, voici le troisième jour que ce événements se sont produits. Il est vrai que quelques femmes d’entre nous, nous ont fort étonnés. Elles se sont rendues de bon matin au tombeau et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des anges leur sont apparus et ont déclaré qu’il est vivant. Quelques uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses précisément comme les femmes l’avaient dit; mais lui, ils ne l’ont pas vu.»

VERSETS 25 À 27 :

Alors Jésus leur dit : « hommes sans intelligence, et dont le coeur est lent à croire tout ce qu’on dit les prophètes!

Le Christ ne devait-il pas endurer ces souffrances et entrer dans sa gloire?

Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Ecritures ce qui le concernait

Temps de la Parole :

On passe de l’accompagnement silencieux, respectueux, invitant au partage, à Jésus qui prend la parole et qui « fait parler la Parole ». Les disciples connaissaient les passages cités mais les interprétaient différemment (messie triomphant, libérateur politique). Jésus ouvre la Parole et leur fait découvrir ce qui le concerne. Pédagogie de la parole de Dieu par l’histoire d’Israël, Jésus prend le temps de relire les écritures, Moïse, les prophètes.

Et cette lecture éclairée devient nourrissante, chaleureuse (« notre coeur ne brûlait il pas lorsqu’il nous expliquait les écritures »

(Attention de ne pas faire de la Bible une lecture partisane et sectaire pour valider ses préjugés et idées préconçues (afrikaners et apartheid, Juifs religieux et évangéliques sionistes, commerce d’esclaves aux US).

VERSETS 28 ET 29 :

Lorsqu’ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant: « reste avec nous car le soir approche, le jour est déjà sur son déclin. »

Il entra pour rester avec eux.

On constate que les deux pèlerins regrettent de devoir quitter l’étranger, ils le retiennent.

Là encore Jésus ne s’impose pas, c’est eux qui le retiennent. Ils sont touchés, quelque chose se passe : « reste » « demeure » (habite avec nous durablement, entre en communion avec nous,)

VERSET 30 :

Pendant qu’il était à table avec eux, il prit le pain, prononça la bénédiction, puis il le rompit et le leur donna.

D’emblée, l’étranger se comporte comme le maître de maison:

Imaginons la scène: une chambre haute, assemblés autour du pain. Il prend le pain, le bénit (il rend grâce=eucharistie en latin).

Ensuite il rompt le pain (conformément aux usages) on imagine bien le côté convivial de cette scène, chaleureux, fraternel, rompre le pain : « casser la croûte entre amis ». La relation entre les disciples et l’étranger devient plus intime, plus amicale, et dans cette atmosphère de communion fraternelle, d’intimité, …ils le reconnaissent.

VERSET 31 :

Alors leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent mais il disparut de devant eux.

A quoi le reconnurent-ils ? A sa silhouette ? A sa voix ? A son accent galiléen ? Non.

La reconnaissance survient, leurs yeux s’ouvrent quand Jésus s’installe dans le rôle du père de famille (fraction du pain). Tout se déplace : il n’est plus leur invité, mais c’est lui qui les invite. Ils étaient impatients de lui offrir l’hospitalité, mais finalement c’est lui qui les accueille et c’est lui qui les sert en distribuant le pain. Pourquoi l’ont-ils reconnu ?

Ils étaient enfermés sur eux-mêmes, incapables de reconnaître Sa présence, et ce pain qu’il leur distribue dans la main, c’est comme un morceau d’espérance.

Ça nous ramène bien sûr à notre repas du Seigneur, la table du Seigneur, la sainte Cène, que nous allons célébrer tout à l’heure. Nous préparons la table, nous y déposons du pain, du vin, mais en fait c’est le Seigneur lui même qui nous invite à sa table pour festoyer. Nous étions perdus et nous sommes retrouvés, nous avons fait fausse route, il nous invite à partager le pain de la vie qu’il bénit, à « manger son corps, boire de son sang », pour être nourris, être comblés de sa présence,

À chaque repas du Seigneur, je me retrouve à Emmaüs.

SUBITEMENT INVISIBLE

À peine réalisé qu’il était là, il disparaît, il devient invisible.

Jésus remet de la distance entre lui et ses disciples et les renvoie à leur vie quotidienne.

En disparaissant, il les aide à devenir adultes, à assumer leurs responsabilités d’hommes et de femmes. Ils comprennent que la capacité de le reconnaître dans leur vie n’est pas de l’ordre de la vue, mais de la foi, ce n’est pas de l’ordre du savoir, de la certitude, mais de l’expérience et du vécu.

CONCLUSION :

Jésus accompagne ses disciples jusque dans leurs erreurs, et nous laisse parfois nous tromper de chemin.

À notre tour dans notre rôle d’ accompagnateurs,de compagnons que nous exerçons au quotidien ou dans nos métiers d’éducateurs, d’ enseignants, de parents,nous sommes appelés à accompagner les autres dans leurs souffrances, dans leurs échecs, dans leur désespoir. Apprenons de Jésus à :

– marcher discrètement dans les pas de nos frères.

-prenons le temps de l’amitié, de la solidarité, de la fraternité, devenons proches sans nous imposer.

– laissons les se raconter, sans les juger.

– puis sachons utiliser la Parole, pour réveiller l’espérance, le désir de vivre.

– sachons les guider vers Jésus, lui-même saura leur ouvrir les yeux.

Puis enfin, comme Jésus, sachons disparaître.