N’oublie pas de sanctifier le jour du Sabbat

Catégories : Paroles de dimanches

Exode 20.8-11

Introduction : pertinence des dix commandements.

Contexte actuel : le sens du travail… (les progrès techniques ont libéré l’homme des travaux pénibles…), la menace économique, la baisse du pouvoir d’achat rejoignent les questions du temps de travail, de la mondialisation, la compétitivité des systèmes, des individus… On voit la tentation de faire monter la pression des cadres, des employés… La peur de la précarité pour les uns, l’appât du gain, poussent la société à accepter d’ouvrir le dimanche, pour la grande distribution, et donc aussi pour les petits commerçants, et finalement tout le monde.

Précarité, appât du gain, cupidité font que nos sociétés que l’on prétend libres aliènent les hommes. Plus de flexibilité, moins de choix pour les travailleurs entraîneront une meilleure compétitivité et conduiront à une société où l’individu (surtout s’il est pauvre) n’aura plus aucun droit.

Quand je dis cela, je ne prêche pas pour que l’on adhère à L.C.R. ( Pourtant Besancenot a souvent des formules telles que : « Nos vies valent mieux que leurs profits », qui semblent être presque évangéliques).

La loi telle qu’elle est édictée dans les dix commandements est faite pour protéger les faibles contre les puissants. Elle limite le droit des forts.

Notre société est en mutation, on parle de quête de valeurs, respect des droits de l’homme, mondialisation, compétition, bioéthique, menace atomique, menace écologique… Dans cette quête à trouver des valeurs pour nos sociétés, les dix commandements (les dix paroles transmises à Moïse il y a plus de 3000 ans dans le désert et l’exode) peuvent être des bornes, des repères dans le désert de valeurs où nous nous trouvons.

Souvent les dix commandements sont perçus comme une liste de : « Tu ne dois pas… » liberticide, reçue comme des contraintes à la liberté.

Rappelons le contexte dans lequel les dix commandements ont été donnés.

Ces paroles sont celles de Dieu qui s’adresse à son peuple (Exode 20.1). Ces paroles n’ont pas pour but d’entraver la liberté du peuple. Au contraire, elles sont destinées à protéger la liberté à laquelle Dieu conduit son peuple. Elles sont des paroles de vie, d’amour, d’affection.

Ces paroles sont données au peuple quand il traverse le désert, après avoir été libéré de l’Egypte (où il était en esclavage et n’ avait aucun droit). Le peuple va vers la liberté et cette liberté nouvelle doit être protégée d’autres tyrans extérieurs (idoles, pouvoirs), mais aussi tyrans intérieurs (convoitise, colère…).

Dans Exode 20.2, Dieu rappelle ce qu’il a fait, comment il s’est révélé (à Moïse). Il a vu la misère de son peuple (Exode 3.7).

Quand Dieu parle, il vise à libérer les Hébreux et tous les hommes des « tortionnaires », des oppresseurs qui les poussent à la surproduction.

Et Dieu délivre ses commandements avec tendresse. C’est un Dieu libérateur, c’est aussi un Dieu paternel et maternel, qui, comme un père et une mère, prend en charge et protège ses enfants.

Référence à la création

Dans ce texte d’ Exode 20, le commandement se justifie par rapport à la création.

Dieu s’est reposé de ses oeuvres, nous sommes invités nous aussi à nous dispenser de travailler un jour par semaine, participant ainsi au repos de Dieu.

C’est une faveur que Dieu nous accorde. D’ailleurs le commandement du sabbat n’a pas pour but premier d’obliger de rendre un culte à Dieu. Beaucoup de juifs et de chrétiens ont réduit ce commandement à une obligation d’assister à un culte.

Dans ce commandement, Dieu n’a pas le souci d’être glorifié, il a le souci de l’homme, de sa liberté, et de sa libération. Dieu veut offrir à l’homme un temps régulier de repos. Dieu a créé un espace de liberté pour nous permettre de « souffler ».

Aussi Dieu bénit notre repos. Il nous permet de prendre du champ, de la distance vis à vis de notre travail pour rendre ce dernier plus humain et serein.

Mais le projet de Dieu pour le sabbat ne s’arrête pas là. C’est aussi un temps offert pour éprouver en nous et chez les autres ce que Dieu fait de bon. Ce temps sert à renouveler nos forces intérieures et à se réapproprier le désir fondamental de Dieu sur nous, son regard sur nous : « Et il vit que cela était bon. » (Genèse 1.31).

Le sabbat, expérience de libération

Dieu a sanctifié le sabbat = mis à part, séparé. Il l’a arraché au monde et à ses puissances. La sabbat nous arrache à l’angoisse de la performance professionnelle, économique, à la pression de nos échéances, de nos supérieurs, de nos clients… C’est un temps sacré qui appartient à Dieu et à nous. Le sabbat : remède pour ne pas succomber à l’agitation intérieure et extérieure, et donc une invitation à se mettre en relation avec ce Dieu qui veut nous libérer, et aussi avec notre être moins superficiel, notre intériorité.

Les promesses qui s’attachent au sabbat

Déjà du temps de Jésus (probablement avant déjà, et après lui aussi !), le sens du sabbat avait perdu de sa pertinence. Au lieu de célébrer la liberté offerte à l’homme et les promesses qui s’y rattachent, on avait contraint l’homme en lui imposant des règles tatillonnes. Obéir au règlement était plus important que de se questionner sur le sens de ce jour.

A l’époque de Jésus, il n’y avait plus 10 commandements mais 248 commandements et 365 interdictions ayant valeur de commandements. De l’esprit des commandements, il ne restait plus que la lettre et la superstition, la peur.

Jésus a repris les dix commandements et les a résumés en un seul : Celui de l’amour. Seul l’amour donne la vie aux commandements.

Intentionnellement Jésus a transgressé ces règles étroites. Il a été condamné par les religieux. Il leur a répondu : « Le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat ».(Marc 2.27).

Jésus avait délibérément guéri le jour du sabbat. En guérissant précisément ce jour-là, Jésus renouvelle notre vision étroite de Dieu. En ce jour-là, par notre disponibilité, Jésus nous rappelle que Dieu veut nous restaurer, nous guérir, nous libérer de nos déformations.

Dans Luc, Jésus guérit la femme courbée depuis des années et le chef de la synagogue s’en étonne (Luc 13.14). Jésus répond : « ne fallait-il pas délivrer cette femme le jour du sabbat ? »

Dieu (Jésus) nous rappelle la véritable signification de ce jour :

– prendre conscience de sa liberté d’enfant de Dieu.

– prendre conscience que Dieu nous veut guéris, (pas forcément physiquement), conscients de notre beauté, de notre dignité.

– prendre conscience de « l’espérance qui s’attache à son appel », à son alliance.

Aussi, le jour du sabbat nous sommes invités, encore plus que les autres jours, à sortir de nos difficultés quotidiennes et à accéder à la liberté, à l’espérance, dans un pays de liberté. Nous sommes fils et filles de Dieu.

Le sens suprême du sabbat en Jésus

En Jésus nous fêtons le sabbat en prenant conscience que dans sa mort et sa résurrection, Dieu nous libère de toutes les forces aliénantes de ce monde.

A l’image de la femme courbée, le dimanche nous célébrons la résurrection du Christ, et nous ressuscitons, nous nous relevons en sortant du tombeau de nos peurs, de nos résignations, de nos jugements.

En Christ, par sa mort, par sa résurrection, nous sommes libérés de nos chaînes. Il nous invite à nous redresser afin de louer le Seigneur, à découvrir notre dignité, notre valeur, et fortifiés nous pouvons affronter toutes les pressions venant d’autrui, de la société. Le dimanche, personne ne peut nous asservir. Le dimanche devrait demeurer un espace de liberté et nous protéger des intérêts d’une économie qui voudrait se servir de nous comme des machines « à produire », et « à consommer », des « cibles marketing » bien formatées.

Conclusion

Pour rester dans le domaine économique et sociétal :

Le dimanche pourrait devenir une forme de protestation contre le diktat de l’économie de marché, mondialisé, le diktat de la croissance, de la production de richesses matérielles.

Un philosophe allemand a dit : « Le dimanche, c’est le contre-projet chrétien à une société où l’individu n’a de valeur qu’en raison de sa contribution au processus économique ». (la France qui se lève tôt, la France des méritants).

Le dimanche s’oppose au diktat de la productivité en forgeant un esprit de résistance à l’encontre d’une évolution des mentalités vers un temps de travail où tout le monde devrait être disponible 24heures/24.

Donc regardons ce jour offert par Dieu :

– comme une conquête contre la servilité.

– comme un jardin à cultiver pour la beauté.

– comme un espace de liberté pour rencontrer le Seigneur, pour rencontrer les amis.

– comme un temps de repos pour nos corps, nos esprits.

– comme une invitation à réfléchir sur un mode de vie moins frénétique.